Forte de ses 117 articles, l’ordonnance n°2014-326 du 12 mars 2014, devant entrer en vigueur le 1er juillet 2014, opère une réforme supplémentaire des principaux points du droit des entreprises en difficulté. L’article 85 de cette ordonnance retient cependant particulièrement l’attention en ce qu’il introduit dans le Code de commerce français une nouvelle procédure : le rétablissement professionnel. Apparemment apparentées à la liquidation judiciaire, à en juger par son positionnement dans le ledit Code, cette procédure est pourtant « sans liquidation ». Il faut scruter les dispositions elles-mêmes, les travaux les ayant inspirées et la loi ayant habilité le Gouvernement à intervenir en la matière, pour discerner en quoi se singularise le rétablissement professionnel, destiné à mettre un terme plus facilement à la situation de certains débiteurs dont la situation est irrémédiablement compromise.
Les débiteurs concernés
Le rétablissement professionnel n’est ouvert qu’à une personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante (commerciale, artisanale, agricole ou libérale), en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible ; pourvu toutefois qu’elle ne soit pas sous statut d’EIRL, qu’elle ne fasse l’objet d’aucune procédure collective en cours, qu’elle n’ait employé aucun salarié au cours des six derniers mois, que son actif déclaré ait une valeur inférieure à un montant à fixer par décret, qu’elle ne soit pas impliquée dans une instance prud’homale et qu’elle n’ai pas fait l’objet depuis au moins cinq ans d’une procédure de liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d’actif ou d’une décision de clôture d’une autre procédure de rétablissement professionnel.
Le déroulement de la procédure
C’est le débiteur qui demande l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire qui peut, dans le même actes, solliciter l’ouverture de la procédure de rétablissement professionnel. Après avis du ministère public, le tribunal, s’il estime la demande justifiée, ouvre pour un durée de quatre mois la procédure de rétablissement professionnel et, ce faisant, nomme un « juge commis » ainsi qu’un « mandataire judiciaire » pour l’assister dans sa recherche de renseignements sur la situation patrimoniale du débiteur (aucun liquidateur n’est désigné). Durant cette période d’enquête, le débiteur n’est pas dessaisi, il n’y a pas d’arrêt des poursuites individuelles des créanciers (mais si le débiteur est mis en demeure ou poursuivi par un créancier au cours de la procédure, le juge commis peut, à la demande du débiteur reporter le paiement des sommes dues et la suspensions des procédures d’exécutions pour un délai maximal de quatre mois) et les créanciers n’ont pas à déclarer à proprement dit leurs créances (néanmoins, dans les effets habituellement attachés à la déclaration des créances, la mandataire judiciaire informe les créanciers connus de l’ouverture de la procédure et les invite à lui communiquer tous éléments utiles sur leurs créances). Après nouvel avis du ministère public, rapport du mandataire judiciaire et renvoi de l’affaire par le juge commis devant le tribunal, l’issue normale de la procédure est un jugement de clôture qui efface purement et simplement les dettes à l’égard des créanciers dont la créance, dûment répertoriée, est née avant le jugement d’ouverture (à l’exception, entres autres, des créances des salariés, des créances alimentaire et des créances résultant d’une condamnation pénale). Il n’est donc pas procédé aux opérations classiques de liquidation judiciaire (réalisation de l’actif apurement du passif).
Les visées des dispositions
Applicable à une parti seulement des débiteurs envers lesquels le législateur prévoit l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire stricto sensu, la procédure de rétablissement professionnel a pour ambition de simplifier et accélérer les étapes judiciaires mettant fin à une affaires professionnels dont plus rien ne peut être espéré, si ce n’est pas la reconnaissance pour les créanciers de pertes à constater dans leur comptabilité. Peut être pas si facile à mettre en oeuvre mais favorable aux débiteurs éligibles, dont il n’est pas sûr qu’ils seront aisément identifiables étant donné, comme on l’a vu, la multiplicité des critères qui les définissent, le rétablissement professionnel pourrait être tentant pour des débiteurs de mauvaise foi, quand bien même il est aussi légalement prévu, notamment en ce cas, la possibilité pour le tribunal d’ouvrir à tout moment une procédure de liquidation judiciaire. Il demeure que, à l’instar d’autres pays et à défaut d’endiguer la cessation d’activité des entreprises, le rétablissement professionnel, procédure à part, devrait faire mécaniquement baisser le nombre des liquidations judiciaires de droit commun.