L’ordonnance n°2014-326 du 12 mars 2014, portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, et dont le décret d’application est attendu, entrera en vigueur le 1er juillet 2014. Seules certaines dispositions relatives à la Liquidation Judiciaire (LJ) s’appliqueront aux procédures en cours.
Cette refonte du Livre VI du Code de commerce vient renforcer l’efficacité de la prévention, simplifier et réduire le délai des procédures. Par ailleurs, le texte a vocation à rééquilibrer les intérêts entre les parties.
Sic vous propose un panorama des principales dispositions intéressant la profession. Un tel point détaillé paraîtra prochainement dans la Revue Française de Comptabilité.
Renforcement de la prévention
La procédure d’alerte du président du Tribunal de Commerce (TC) est étendue au président du Tribunal de Grande Instance (TGI). Ainsi, les personnes physiques exerçant une activité indépendante ou agricole, y compris les professions libérales, pourront désormais en bénéficier.
Lorsque l’entreprise débitrice dispose d’un commissaire aux comptes, ce dernier devra être informé de la décision nommant un mandataire ad hoc.
La procédure de conciliation est renforcée au profit du débiteur
- Le président du TC peut désormais obtenir communication, dès la conciliation par les experts-comptables et les commissaires aux comptes, comme d’autres professionnels, de toute information « lui permettant d’apprécier le situation économique, financière, sociale et patrimoniale du débiteur et ses perspectives de règlement », malgré toute disposition législative ou réglementaire contraire.
- Les clauses contractuelles faisant obstacle au recours à un mandat ad hoc ou à une conciliation en aggravant la situation du débiteur sont réputées non écrites.
- Les cautions peuvent se prévaloir, comme le débiteur, des articles 1244-1 à 1244-3 du C. civ.
- La capitalisation des intérêts est interdite : les intérêts échus des créances à plus d’un an ne peuvent plus produire d’intérêts.
- Deux nouvelles missions du conciliateur :
- Le mandataire peut se voir confier l’organisation d’une « précession », c’est à dire la recherche d’un repreneur pour une cession totales ou partielle de l’entreprise, dans le cadre d’une procédure collective future. L’accord de débiteur et l’avis des créanciers sont nécessaires.
- Le président, à la demande du débiteur, peut désigner le conciliateur en tant que mandataire à l’exécution de l’accord. Il surveillera son exécution et pourra, en cas de difficulté, mettre fin à cette mission.
Confirmation du privilège de « new money » au profit des créanciers
Les apports en trésorerie et fournitures de biens ou de services, consentis à n’importe quel stade de la conciliation, même en amont de la conclusion de l’accord, bénéficient du privilège « d’argent frais », dès lors que le conciliation aboutit à un accord homologué par le TC. On notera que ces créances ne sont plus soumises au délai du plan mais sont traitées hors plan.
Procédure collectives : rééquilibrage des intérêts en présence
Concernant la procédure de sauvegarde « classique », il est désormais possible aux comités des créanciers de présenter un projet de plan « concurrent » à celui de débiteur au président du TC, après le rapport de l’administrateur, qui devra choisir entre les plans. Par ailleurs, l’introduction de l’exigibilité du capital non libéré, le non-capitalisation des intérêts de retard, le suppression du paiement comptant, ou encore l’incorporation au capital de créances dans la limite de la réduction admise en cas d’augmentation de capital, etc.. viennent compléter la sauvegarde.
A propos du redressement judiciaire, on notera, parmi les nouveautés, le rôle plus important des comités de créanciers, la nullité de la déclaration d’insaisissabilité intervenue pendant la période suspecte et la possibilité de l’annuler l’annuler lorsqu’elle a été réalisée dans les six mois précédant la date de cessation des paiements.
Quant à la LJ, le cession autorisée par dérogation aux personnes interdites (accordée également en sauvegarde), la restitution des règlements, indûment reçus et la clôture de la liquidation sont de nouvelles modalités de la procédure. Lorsque la procédure de LJ est simplifiée, le délai de vente des biens est étendu de trois à quatre mois, et sa clôture obligatoire est raccourcie à un délai de six mois (prorogeable de trois mois);
Focus sur deux nouvelles procédures
La sauvegarde accélérée
Cette procédure éclair, inspirée de la SFA, s’ouvre à la demande d’un débiteur engagé dans une procédure de conciliation ayant élaboré un projet de plan recevant un large soutien des créanciers. Les comptes du débiteur doivent être certifiés par un commissaire aux comptes ou établis par un expert-comptable, ou consolidés. La cessation des paiements est possible à condition qu’elle n’excède pas 45 jours à la date de la demande d’ouverture de la conciliation.
Le jugement d’ouverture est rendu après examen du rapport du conciliateur en présence du ministère public. Un administrateur ou mandataire judiciaire est désigné. Les seuils d’ouverture en termes de salariés, chiffre d’affaires ou total de bilan seront fixés par décret. La durée maximum est de trois mois pour arrêter un plan, sous peine de clôture.
On notera que la constitution de comités des créanciers est ordonnée par le TC lors de l’ouverture, en deçà des seuils obligatoires de 150 salariés et 20 M d’euros de chiffres d’affaires. Le débiteur doit déclarer la liste des créances de chaque créanciers certifiée par le commissaire aux comptes ou ayant fait l’objet d’une attestation par l’expert-comptable.
Attention, contrairement à la sauvegarde classique maintenue, la sauvegarde accélérée et la nouvelle SFA, préventives, ne peuvent être converties en une autre procédure collective.
La PRP : Procédure de Rétablissement Professionnel sans liquidation
Cette procédure, inspirée de celle du surendettement des particuliers, pourrait concerner 20 000 personnes par an. Elle n’est ouverte qu’au débiteur personne physique (hors EIRL) qui a déclaré son état de cessation de paiement et demandé l’ouverture d’un LJ.
Le TC vérifie au préalable que le débiteur répond au critères cumulatifs suivants et prend l’avis du ministère public :
- aucune procédure collective en cours ;
- par le LJ ni de clôture d’une PRP depuis moins de cinq ans ;
- aucun salarié employé dans les six derniers mois, ni d’instance prud’homale en cours ;
- actif inférieur à un montant fixé par décret (probablement 1 500 euros).
Un juge commis et un mandataire judiciaires sont désignés en vue d’évaluer les montants du passif et des actifs du débiteur. La PRP n’excède pas quatre moins durant lesquels le report des règlements et la suspension des poursuites sont imposés aux créanciers sur le demande du débiteur. Sa clôture entraîne l’effacement des dettes nées antérieurement au jugement d’ouverture, connues du juge commis par déclaration du débiteur (attention au passif non déclaré) et ayant fait l’objet de l’avis du mandataire judiciaire. Ne peuvent être effacées les dettes alimentaires, salariales ou pénales, ni les dettes résultant d’un cautions qui a payé en lieu et place du débiteur. Les dettes effacées sont mentionnées dans l’ordonnance de clôture.