L’autorité de la chose jugée attachée à l’ordonnance du juge commissaire n’est pas opposable au tiers qui invoque un droit de propriété concurrent dont la preuve peut être rapportée par un commencement de preuve par écrit du contrat de vente immobilière.

Une personne physique avait, par acte sous seing privé, acquis d’une SCI plusieurs parcelles d’un ensemble immobilier avant que celle-ci ne fasse l’objet d’une liquidation judiciaire. Le liquidateur cède de gré à gré, avec l’autorisation du juge-commissaire, l’une de ces parcelles à un autre acquéreur, contraignant ainsi le premier acquéreur à former un recours devant les tribunaux alors même que l’ordonnance du juge-commissaire était devenue définitive. La Cour de cassation estime que l’autorité de la chose jugée attachée à cette ordonnance n’est pas opposable au tiers qui invoque un droit de propriété sur un bien dépendant de l’actif du débiteur et que l’acquéreur évincé peut se prévaloir d’une commencement de preuve pas écrit pour établir son titre de propriété.

Il est clair que, s’agissant d’une mesure collective d’exécution du patrimoine du débiteur, une procédure de liquidation judiciaire ne peut saisir, en vue de leur réalisation par la liquidateur, que les biens appartenant au débiteur et non, en principe, ceux des tiers.

Cette solution tombe sous le sens même si elle connait, en cette matière, de nombreuses exceptions. C’est ainsi que l’effet réel de la liquidation judiciaire peut être ressenti, à certaines conditions, sur le patrimoine du dirigeant, sur celui de tiers qui n’auraient pas revendiqué dans le délai légal ou qui auraient confondu leur patrimoine avec celui du débiteur par exemple. En l’espèce s’agissant d’une actif immobilier, le tiers qui entend se prévaloir d’un titre de propriété sur cet actif n’a certes pas l’obligation de revendiquer mais peut se contenter d’une commencement de preuve par écrit du contrat de vente conclu avant le jugement. Dont acte mais, en réalité, l’analyse devrait également tenir compte de l’opposabilité de ce contrat de vente, laquelle passe, en matière immobilière, par une publication à la conservation des hypothèques. Malheureusement, la loi du 10 juin 1994, applicable à notre espèce, ne permettrait pas ce deuxième niveau d’analyse car elle avait tort inopportunément supprimé l’interdiction d’inscrire après le jugement d’ouverture les actes et décisions judiciaires translatifs ou constitutifs de droits réels, créant ainsi un risque avéré de fraude par le mécanisme de l’antidate. Sous ce second angle, on comprend mieux en quoi la seule prise en compte d’un simple commencement de preuve par écrit peut apparaître dangereuse. En droit, positif, il en serait allé différemment dans la mesure où; pour être opposable à la procédure collective du vendeur, le droit de propriété du tiers, même acquis avant le jugement d’ouverture, aurait également dû être utilement publié avant cette date, à moins que l’acte de vente n’ait acquis date certaine ou que la décision constatant le caractère parfait de la cession ne soient devenus exécutoires avant l’ouverture de la procédure collective, ce qui ne semblait pas le cas en l’espèce.